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Kafka et la poupée (bis)
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En 1923, dans un parc de Berlin, un homme et une femme observent une petite fille en pleurs que sa gouvernante réprimande : « Arrêtez de pleurnicher, maintenant. Vous n’aviez qu’à faire attention ! »
Ému par les larmes de l’enfant, l’homme s’approche, s’enquiert de la raison de ses pleurs et apprend que la petite fille a perdu sa poupée.
— Et comment s’appelle-t-elle votre poupée ?
— Elle n’a pas de nom, bougonne l’enfant.
— Ah, mais je la connais, alors !
— Tu connais ma poupée ? s’étonne la petite fille.
— Bien sûr !
— C’est même pas vrai !
L’homme insiste :
— C’est une de mes amies. J’ai reçu d’elle une lettre aujourd’hui. Elle est partie en voyage.
— Tu as la lettre, demande l’enfant, partagée entre soupçon et espoir.
— Euh… non, mais si vous êtes là demain, je vous l’apporterai.
— Promis ?
— Juré !
Aussitôt rentré chez lui, l’homme se met au travail. Le lendemain, il est fidèle au rendez-vous et tend une enveloppe à l’enfant qui pousse une exclamation de surprise. L’homme se met alors à lire la lettre dans laquelle la poupée explique qu’elle souhaitait voyager, même si elle aimait beaucoup la fillette qui s’occupait bien d’elle, mais que le moment était venu pour elle de faire sa vie.
Elle termine en s’engageant à envoyer quotidiennement une lettre. Effectivement, pendant près d’un mois, l’homme vient lire tous les jours une nouvelle lettre de la poupée qui semble vivre des aventures extraordinaires.
La situation ne pouvait durer indéfiniment. Lorsque l’homme arrive ce jour-là, la petite fille lui pose la question rituelle :
— Tu as la lettre ?
— Oui, asseyez-vous, je vais vous la lire.
La poupée y raconte s’être mariée, être très amoureuse de son époux et décrit en détails la belle maison qu’ils habitent. Elle conclut ainsi sa missive : « Tu comprendras toi-même que nous devons désormais renoncer à nous voir. »
L’homme se lève, remet la lettre à la petite fille dont les yeux brillent et lui fait ses adieux.
Il s’appelle Franz Kafka et n’a plus qu’un an à vivre.
Le débunk
Aucune lettre n'a jamais été retrouvée.
Cet épisode de la vie de Franz Kafka a été raconté par Dora, sa compagne, dans ses mémoires.
Dora Diamant, était la dernière maîtresse de Franz Kafka. La femme qui l’a accompagné pendant la dernière année de sa vie. La femme dans les bras de laquelle Kafka est mort de la tuberculose.
Dora a dit qu’elle avait brûlé certains des écrits de Kafka, à sa demande, alors qu’il était allité et mourant. Il a insisté pour qu’elle les détruise, et elle l’a fait. Mais elle n’a pas brûlé la majorité...
Dora a été largement ignorée par les chercheurs parce que les lettres que Kafka lui a envoyées, ses derniers carnets de notes, toute la documentation relatant leur vie ensemble a disparu.
Tout a été volé par la Gestapo dans l’appartement de Dora en 1933, et à ce jour, aucun document n’a été retrouvé. Parce qu’il n’y avait pas de textes, il n’y avait pas vraiment de preuve de leur vie ensemble.
Une femme au destin exceptionnel à propos de laquelle une chercheuse américaine Kathi Diamant, de l’Université de San Diego, a écrit un livre.
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