La science est censurée aux USA

Les chercheurs avec qui je travaille parlent de "censure", de "purge", de "maccarthysme", de "moment orwellien" ou encore "d'obscurantisme technophile". Ce qui se passe aux Etats-Unis est digne d'un régime totalitaire. Au moins 2 000 licenciements dans la recherche publique américaine (d'après les rares infos disponibles), des milliers de pages effacées des sites publics, des mots interdits dans les projets scientifiques, une chasse aux sorcières pour couper les financements jugés "problématiques", des coupes budgétaires massives (même à la NASA), et des menaces de "rétribution" comme Trump les appelle : expulsions, licenciements, harcèlement, voire incarcérations pour celles et ceux qui osent parler. J'aurais voulu citer tous ces scientifiques virés du jour au lendemain ou interdits d'accès aux sessions du GIEC, mais j'aurais peur d'en oublier. Les conséquences de cette censure risquent d'impacter directement les intérêts des habitants des Etats-Unis : dérapage des émissions de GES sans suivi, difficultés pour se protéger face événements climatiques extrêmes, pêcheries menacées, risques épidémiques accrus, une presse entravée faute de données, inaction face aux inégalités, fuite des meilleurs cerveaux... Et en échange ? Une société pluggée à l’IA et au pétrole, où il n’y aura plus ni vérité commune, ni science, juste des opinions qui s’affrontent. La France, est-elle pour autant un oasis pour la recherche ? Pas vraiment. Certes, les chercheurs ne sont pas menacés comme aux USA. Mais l'investissement public dans la recherche et l'enseignement supérieur baisse, les lycéennes se détournent des carrières scientifiques, la recherche est sommée d’être rentable, et dans le débat politique s'opère un glissement sémantique nauséabond : appels à supprimer le CNRS, l’ADEME, attaques contre l’INRAE et l’OFB… Les signaux sont là... Peut-on les ignorer ? Les sciences sont le socle commun, l'horizon commun aussi, de notre société démocratique. Elles produisent des savoirs, permettent le progrès technique et social. Protégeons-les. La France et l'UE doivent non seulement investir pour accueillir les scientifiques américains qui ont perdu leur emploi et souhaiteraient venir travailler ici, mais elles doivent aussi réinvestir dans la production et la transmission de savoirs, y compris des savoirs fondamentaux et pas uniquement appliqués, pour garantir un avenir éclairé à nos enfants. #standupforscience